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05/07/2003 - Marc Cornil, une retraite bien méritée

Le site officiel de la Fondation Belem publie un entretien avec le commandant Marc Cornil qui vient de prendre sa retraite, après avoir accompagné son cher navire de la vieille Europe jusqu’au Brésil l’année dernière, à l’occasion de l’Odyssée Atlantique.

Extraits choisis [notes de 3mats.net entre crochets] où Marc Cornil revient sur son parcours dans la Marine marchande et évoque ces treize années de commandement du Belem qu’il a marqué de sa forte personnalité :

J’ai entendu parler très tôt du Belem puisque mon père qui, dès l’âge de 15 ans, a pris la mer sur un voilier, a embarqué d’abord sur le La Rochefoucauld puis, en 1906, sur le Belem comme jeune matelot. Il a d’ailleurs navigué sous les ordres du Commandant Chauvelot [ lire Commandant Julien Chauvelon ], resté dans l’Histoire pour avoir échappé, avec le Belem, à l’éruption de la Montagne Pelée à Saint-Pierre de la Martinique en 1902. Mon père disait qu’à côté des grands trois mâts, le Belem était un vrai yacht… On l’avait d’ailleurs surnommé le Yacht de Nantes.

Bien que né à Lorient, je suis originaire de Clohars Carnoët, dans le Sud Finistère, qui est toujours resté mon “port d’attache”. J’ai commencé à naviguer à 17 ans comme novice sur un bateau de pêche le long des côtes d’Afrique de l’Ouest, puis, après avoir fait le cours de lieutenant de pêche, j’ai travaillé sur un gros chalutier. Je suis entré ensuite dans la marine marchande et, après deux années d’études à l’École de la Marine marchande de Paimpol, j’ai embarqué d’abord comme officier chef de quart, second capitaine, puis comme capitaine. J’ai beaucoup navigué alors dans l’Océan Indien pour le compte de la Compagnie Havraise Péninsulaire. [Des stagiaires se souviendront des souvenirs émus de Marc Cornil à propos de ses passages à Madagascar].
Par la suite, j’ai intégré la Morbihanaise-Nantaise. Au cours de mes 23 années de commandement, j’aurai sillonné les côtes de l’Océan Indien, l’Amérique, sud et nord, de l’Afrique ainsi que la Mer Baltique…

Quand et dans quelles circonstances avez-vous pris le commandement du Belem? Et pourquoi ce genre de navire ?

C’était le 1er juillet 1990, il y a donc treize ans. Le lien s’est fait par l’intermédiaire de la Compagnie Maritime Nantaise, qui s’occupe de la gestion technique du bateau. J’y ai demandé des nouvelles du Belem et j’ai appris qu’on cherchait un successeur au commandant en exercice. J’ai marqué mon intérêt pour ce navire et dix jours plus tard je recevais un télégramme me demandant d’embarquer sur le Belem. J’ai eu un moment d’hésitation en apprenant que, mon prédécesseur étant hospitalisé, je serais seul à commander, pour la première fois, ce navire à voile. On m’a donné une heure pour prendre ma décision — il m’a fallu exactement cinq minutes pour décider que ce serait oui !
Pourquoi le Belem ? Parce qu’il appartient à la famille des voiliers de tradition, à laquelle je m’intéresse depuis toujours ; déjà mon père en faisait des maquettes, sur lesquelles il m`apprenait le gréement. De plus, le Belem représente l’histoire de la marine marchande, à laquelle je suis aussi très attaché, naturellement, de par ma propre histoire, ma profession.

[…] Il est vrai que c’est un authentique navire de commerce et qu’il n’y en a pratiquement plus de ce type aujourd’hui en état de naviguer. Mais ce n’est pas pour cela qu’il est arrivé jusqu’à nous. La vraie raison, c’est parce qu’il est beau. C’est pour cela qu’il a séduit ses propriétaires successifs. J’aime à dire que, dans ce sens, le Belem est comme une femme : c’est sa beauté qui lui a fait traverser le temps…C’est une mouette élégante. Sa beauté et aussi son excellent entretien.

[…] Si je suis resté 13 ans sur le Belem, c’est parce que j’ai pu appliquer les mêmes règles que sur les navires marchands. Il faut savoir en effet que ces règles nous viennent des grands voiliers d’antan : elles sont donc totalement compatibles avec le genre de bateau qu’est le Belem. Quant aux stagiaires, qui viennent de tous les horizons, s’ils embarquent sur le Belem, c’est qu’ils participent en pratique à une même démarche qui montre leur intérêt pour ces anciens navires de commerce, ce qui rend les rapports avec eux très intéressants.
Certes, ce n’est plus l’intimité professionnelle que connaissent les équipages qui se retrouvent sur les navires marchands ; c’est parfois moins simple mais c’est aussi très divers et très enrichissant.

[…] Si vous écriviez, un jour, un livre sur votre vie avec le Belem, quelles en seraient les lignes de force ?

Ce que je voudrais dire si je l’écris, ce livre, c’est que le Belem, ce vieux navire toujours fringant, permet bien sûr de préserver un passé disparu mais aussi qu’il permet de conserver les méthodes, les usages, les traditions du travail qui se faisait sur ce genre de bateau ainsi que l’ambiance, l’atmosphère qu’on y trouvait. Également, il permet de garder ce beau langage marin qui est en train de disparaître, cette terminologie que toujours moins de gens connaissent aujourd’hui. Bref, les mots et l’esprit des marins…

[…] Il est vrai que j’aimerais un jour écrire sur le Belem ! En attendant, je reste très proche des activités maritimes à travers des missions ponctuelles pour différents organismes, dont la Fondation Belem, et quelques convoyages.

Ainsi, Marc Cornil laisse la place à Jean-Pierre Boin, nouveau commandant en titre, qui continuera à être relayé, comme l’était Marc Cornil, par le très estimé Michel Pery.

C’est un peu la fin d’une époque… et comme une nouvelle vie qui commence pour le Belem.

La fin de saison verra aussi la première prise de commandement d’Éric Saint-Plancat qui connaît bien la maison pour y avoir été souvent officier.

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